Loin d'être un phénomène absolument inédit dans l'histoire de l'humanité, la crise
sanitaire liée à la covid-19 en constitue plutôt une constante. Elle advient non seulement
comme un fait divers, mais intervient comme un véritable vecteur de révolution. À dire
vrai, au-delà des dégâts qu'elle inflige individuellement à ses victimes, elle bouleverse
de manière relativement profonde un certain nombre de pratiques que l'on tendait à
estimer aussi immuables que les fondements de la terre. Il serait impossible au préfacier
et fastidieux pour ses destinataires d'égrainer ici la litanie exhaustive des cas de mutations
culturelles issues des épidémies. Il nous suffit juste, pour nous en convaincre, de nous
souvenir, comme l'a démontré récemment Kyle Harper, que la chute de l'empire romain
s'explique par la propagation des maladies. Plus proche de nos jours, au siècle dernier, un
ensemble de catastrophes sanitaires ont considérablement changé nos moeurs culinaires
et nos traditions alimentaires.
Ces situations donnent à penser que la durabilité de l'homme tient aussi à sa manière
d'habiter la terre ou de cohabiter avec les autres vivants aussi microscopiques soient-ils.
Cette fragilité, que la volonté de puissance effrénée de l'homme sur son environnement
pourrait enfouir dans l'oubli ou dans le refoulement, revient sans cesse à la surface à
la faveur des épidémies qui surgissent de manière répétitive dans notre histoire. Il se
construit donc une sorte d'articulation entre la durabilité de l'homme et son rapport à la
nature.
Alain Patrick Anicet Boubag, dont nous suivons le parcours intellectuel depuis ses étapes
initiales jusqu'aux sommets actuels de la spécialisation, projette un faisceau de lumière
sur cette dialectique homme-nature. Il interroge les influences réciproques de ces deux
entités à l'aide des principes de l'éthique chrétienne. La réflexion qu'il propose est
manifestement brûlante d'actualité. Elle ne saurait, de ce fait, laisser indifférent aucun
esprit raisonnablement constitué. En effet, même si le christianisme ne représente pas
une référence déterminante pour nos options existentielles, ces dernières se vivent dans
un espace culturel où l'impact, même discret ou inconscient de cette religion, demeure
effectif. Le réalisme recommande donc de s'intéresser à la pensée chrétienne en matière
environnementale